SAHOS: Somnolence diurne excessive résiduelle

A retenir:

  • La SDE est à différencier de la fatigue et de l’apathie
  • L’évaluation de la SDEr en médecine générale repose sur l’agenda du sommeil et sur l’Echelle d’Epworth
  • On ne peut pas parler de SDEr avant 6 mois de traitement par PPC.
  • Le risque de SDEr est plus grand si la SDE était déjà présente et sévère avant le traitement par PPC, si c’est un sujet d’âge jeune, qu’il y a un faible IAH au moment du diagnostic et en fonction des comorbidités.
  • Les causes les plus fréquentes de SDEr sont la dette de sommeil et une prise en charge du SAHOS non optimale.
  • La prise en charge médicale de la SDEr se fait en dernier recours, et la prescription initiale est hospitalière.

Définition:

Somnolence diurne excessive (SDE):

Elle est définie par l’incapacité à rester éveillé et alerte pendant la journée, ce qui entraine des périodes de besoin irrépressible de sommeil ou des épisodes involontaires de somnolence ou de sommeil.

Elle est un symptôme cardinal du SAHOS et est associée à :

  • une altération de la qualité de vie
  • un risque accidentel
  • des troubles de l’humeur
  • des troubles cognitifs

Cette SDE est le plus souvent corrigée par le traitement du SAHOS. Dans le cas contraire, on parle de Somnolence Diurne Excessive résiduelle (SDEr). L’origine de cette SDEr est multifactorielle, mais une hypothèse (basée sur des études animales) serait qu’elle résulte de l’exposition longue à une hypoxie intermittente chronique et une fragmentation du sommeil créant des dommages oxydatifs irréversible au niveau neuronale (d’où l’intérêt d’un dépistage et d’un diagnostic précoce du SAHOS).

Le risque de SDEr est plus grand si la SDE était déjà présente et sévère avant le traitement par PPC, si c’est un sujet d’âge jeune, qu’il y a un faible IAH au moment du diagnostic et en fonction des comorbidités (symptômes dépressifs, maladies cardiovasculaires, diabète, douleurs chroniques).

La fatigue:

Elle est définie comme la plainte d’un épuisement physique ou mental (conduisant à une réduction des performances cognitives et comportementales), associée à des difficultés à initier ou maintenir des activité volontaires, mais qui ne sont pas améliorées de façon significative par l’augmentation du repos ou du sommeil. .

L’apathie:

Elle désigne l’absence d’énergie ou de motivation, souvent associée à une réduction des affects. Elle peut être associée à la clinophilie: augmentation du temps passé au lit, sans dormir. Elle est souvent présente lors d’un épisode dépressif caractérisé ou lors de maladie neurodégénérative (Parkinson, Alzheimer).

Si il faut bien différencier la SDE de la fatigue ou de l’apathie, elles peuvent très bien être associées, avec comme résultante une majoration du handicap.

Evaluation de la SDEr:

En cas de suspicion de SDEr il est recommandé de:

  • Effectuer un interrogatoire complet et détaillé.
  • Faire réaliser un agenda du sommeil
  • S’aider de questionnaires, le plus répandu étant l’Echelle de somnolence d’Epworth.
  • Evaluer systématiquement le risque d’accident en lien avec la conduite automobile.

Pour l’évaluation du risque d’accident, poser une question précise: « Au cours de l’année précédente, avez-vous expérimenté au moins un épisode de somnolence sévère au volant rendant la conduite difficile ou vous obligeant à vous arrêter ? »

Pour la mesure objective de la somnolence, qui sera effectuée dans un centre spécialisé: tests itératifs de latence d’endormissement (TILE) et tests de maintient d’éveil (TME). Ils sont détaillés ici.

Ces tests ne sont pas obligatoires, mais sont recommandés et d’autant plus en cas de signes d’alertes:

  • Sujet jeune (<40 ans)
  • Prise de poids rapide
  • Puberté précoce
  • SDEr sévère
  • Activité onirique lors des siestes
  • Paralysie du sommeil, Hallucinations, Cataplexies, inertie sévère.
  • Suspicion de troubles du sommeil concomitants.
  • Sévérité de la SDEr difficile à évaluer.
  • IAH non sévère avant traitement (<30 par heure)

Les causes de la SDEr:

Avant même le traitement du SAHOS, il faut envisager une autre étiologie possible à la SDE.

La dette de sommeil:

La cause la plus fréquente de SDEr est la dette de sommeil, qui doit être recherchée à l’interrogatoire et bilantée à l’aide de l’agenda du sommeil:

  • Un temps de sommeil de moins de 6 heures par nuit en moyenne pendant au moins une semaine doit faire évoquer une privation de sommeil.
  • Dans ce cas, il faut réaliser une extension de ce sommeil jusqu’à 7 à 9 heures par nuit, pendant au moins deux semaines, avant de réévaluer la SDEr.

Causes iatrogènes:

Révision systématique des traitements, particulièrement:

  • Agonistes dopaminergiques
  • Antalgiques de pallier 2/3
  • Antihistaminiques
  • Benzodiazépines, neuroleptiques
  • Certains antidépresseurs
  • Certains anti hypertenseurs

Une prise en charge du SAHOS non optimale:

Devant une SDEr, un problème lié à l’appareillage doit être systématiquement évoqué:

  • Observance thérapeutique à la PPC (au minimum 4h par nuit mais à rapporter à la durée de sommeil du patient).
  • Efficacité de la PPC sur le trouble respiratoire du sommeil
  • Evaluation de la tolérance de la PPC: effets indésirables? (fuites, sécheresse nasale, masque bruyant…)

L’observance thérapeutique doit être la plus proche de la durée de sommeil du patient, avec un minima à 6h par nuit pour la plupart des cas.

A savoir que le bénéfice du traitement sur la SDE se fait sur 6 mois! Ainsi, il ne faut pas évoquer une SDEr avant ces 6 mois de traitements (3 mois d’optimisation puis 3 mois de traitement effectif avant réévaluation).

Enfin, il peut être nécessaire d’évoquer les autres traitements du SAHOS (OAM?) mais également de tester la PPC en polysomnographie, avant d’envisager un traitement médicamenteux.

Troubles psychiatriques comorbides et troubles du rythme circadien:

Les troubles de l’humeur (trouble dépressif caractérisé, trouble bipolaire), troubles anxieux, trouble déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité, trouble schizophrénique, trouble de stress post-traumatique et troubles addictifs sont tous pourvoyeurs de SDE.

Parmi eux, l’épisode dépressif caractérisé est de loin le plus fréquent (48% de SDE lors d’un EDC) et même le plus fréquent dans la population générale.

Ainsi, ces troubles sont à recherché lors d’un SAHOS (les symptômes pouvant être communs, et la relation entre SDE et EDC bi directionnelle).

Afin d’évaluer ces troubles, on peut se servir de l’Echelle HAD (trouble anxieux ou dépressif) ou de l’Echelle PHQ-4 (trouble anxieux généralisé et dépressif).

A noter que le trouble d’insomnie chronique est rarement responsable d’une SDE mais plutôt d’une fatigue.

Les troubles du rythme circadien sont également à rechercher et à traiter.

Troubles neurologiques comorbides:

Hypersomnolence d’origine centrale, maladie de Parkinson, maladie d’Alzheimer, accident vasculaire cérébral, sclérose en plaques, épilepsie…

Autres causes médicales:

Pathologies inflammatoires chroniques, cancers, troubles métaboliques, endocriniens (obésité, hypothyroïdie, diabète, insuffisance rénale ou hépatique), infections (syndrome « post-COVID »). Ceci est particulièrement vrai pour l’obésité (par une inflammation de bas grade) et un syndrome obésité hypoventilation insuffisamment traité est à rechercher. Les douleurs chroniques peuvent également entrainer une fragmentation du sommeil, et leur prise en charge, notamment durant la nuit, doit être optimisée. Enfin, une rhinite chronique avec obstruction nasale est à rechercher (avec une mauvaise compliance de la PPC qui en résulte).

Ainsi, un bilan minimal est recommandé: TSH, créatinine, ferritine, transaminases, numération formule sanguine, bicarbonates et CRP

Prise en charge de la SDEr:

Prise en charge non médicamenteuse:

Il s’agit des principes d’hygiène du sommeil. Des siestes anticipées, de courte durée (15/20 minutes) peuvent être utilisée et doivent systématiquement être envisagées. L’activité physique, l’exposition à la lumière du jour (surtout le matin), la consommation de thé ou café, et la limitation d’ingestion de sucres rapides font également partie de la prise en charge.

Prise en charge médicamenteuse:

Elle s’envisage après un bilan exhaustif et si:

  • la somnolence est constante et handicapante
  • malgré les mesures comportementales (allongement du temps de sommeil, repos, sieste)

Il existe deux molécules, qui ont initialement eu l’AMM dans la narcolepsie: le solriamfetol et le pitolisant. Leur prescription initiale est hospitalière et réservée au spécialiste.

  • Solriamfétol (Sunosi) VIDAL / RCP :
  • Sympathomimétiques d’action centrale, effet d’inhibiteur de la recapture de la dopamine et de la noradrénaline.
  • Risque Cardiovasculaire (augmentation de la pression artérielle (PA), de la fréquence cardiaque (FC) de façon dose dépendante) et psychiatrique (anxiété, insomnie, irritabilité, etc.). Ainsi un contrôle fréquent de la PA et de la FC est recommandé.
  • Dose initiale de 37.5mg par jour avec une augmentation possible: progressive (par pallier de 3 jours) jusqu’à une dose maximale possible de 150mg/j.
  • Effets indésirables les plus fréquents: céphalées, nausées pertes d’appétit.
  • Pitolisant (Ozawade) VIDAL / RCP : Traitement de première intention.
  • Agoniste inverse des récepteurs histaminergiques H3. Stimule le système histaminergique.
  • Effets secondaires: nausées, céphalées, insomnie.
  • Bien toléré sur le plan cardiovasculaire!
  • Dose initiale de 4.5mg/j (le matin) puis une augmentation peut être proposée chaque semaine jusqu’à 18mg/j.
  • Les autres traitements éveillants (le modafinil, le méthylphénidate, les amphétamines) sont parfois utilisés hors AMM. Ils sont décris ici.


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Sources:

– Recommandations pour la pratique clinique du syndrome d’apnées hypopnées obstructives du sommeil de l’adulte, 2010. https://www.sfrms-sommeil.org/wp-content/uploads/2012/10/HS3_reco_sas2010-1.pdf

– Recommandations pour le bilan et la prise en charge de la somnolence résiduelle dans le syndrome d’apnées-hypopnées obstructives du sommeil: https://www.em-consulte.com/article/1609175/article/recommandations-pour-le-bilan-et-la-prise-en-charg

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